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Rencontre avec un architecte bois hors norme : de l'amour du matériau et du bel oeuvre !

01/06/2001
Issu d'une longue lignée de charpentiers de Libourne (Gironde), Jean-Jacques Soulas a exercé son métier de charpentier, de l'apprentissage au brevet de maîtrise, dans le cadre du « Tour de France », sous l'égide de l'Association Ouvrière des Compagnons du Devoir du Tour de France. Il a ensuite participé, pendant deux ans, à la rédaction de « l'Encyclopédie des Métiers - La charpente et la construction en bois », puis il a rejoint l'Ecole Spéciale d'Architecture à Paris, où il a fait ses études d'architecte, tout en y assurant le cours de « Construction bois ». Consultant UNESCO dans le cadre de la restauration d'une citadelle en Haïti, ou encore auprès du LRBB (Laboratoire de Rhéologie du Bois de Bordeaux) dans le cadre d'un programme de recherche européen sur le renforcement localisé du bois au moyen de matériaux composites, enseignant, expert judiciaire, voilà quelques-unes des casquettes de cet architecte atypique, pour lequel amour du bois et travail bien fait jalonnent son parcours personnel.

C'est sur un de ses chantiers à Biscarrosse (Landes), que nous avions convenu d'un rendez-vous. Rien de tel que le terrain pour se rendre compte de la beauté du matériau bois : voir, sentir, toucher, le bois est un matériau qui éveille les sens.

Son choix : des ouvrages de qualité.

300 m2 habitables, une grosse charpente en douglas, un remplissage en panneaux à ossature bois, du pin maritime pour l'escalier, le garde-corps de la galerie ainsi que le parquet à lames larges, de l'épicéa pour les lambris de toiture, du mélèze pour les lambris verticaux, du châtaignier pour les menuiseries intérieures, du teck pour le sol de la salle de bain, bref le bois dans tous ses états et dans toutes ses essences. « D'une manière générale, il s'agit toujours de répondre aux attentes d'un client qui exprime ses envies et ses préférences. Le projet doit tirer parti de ces contraintes, et formuler des propositions, en matière de choix des essences et de qualité des bois, qui doivent être valorisées par une mise en œuvre adéquate ».

"Paradoxalement, la difficulté de cette réalisation a été de trouver du bois et des fournisseurs qui nous procurent des produits conformes à nos exigences et livrés dans les délais. Je suis au regret de dire qu'en plein cœur du massif landais, les professionnels de la filière-bois s'adaptent difficilement à la demande : soit on a affaire à des industriels qui proposent des produits, certes de qualité, mais totalement standardisés, soit on se tourne vers la petite entreprise où la rigueur n'est pas toujours respectée. Le pin des Landes est un matériau magnifique, aux qualités esthétiques indéniables, encore faut-il savoir le valoriser correctement en jouant la carte de la qualité. Quand on se retrouve avec un bois de charpente de pays plus cher que certains bois d'importation, qui offrent la garantie d'un classement et dont la qualité est homogène, on se pose des questions...".

"Pour cette réalisation, j'ai travaillé en étroite collaboration avec l'entreprise Pascal Lorin, charpentier à Biscarrosse qui a préparé les composants en atelier. Le levage proprement dit a été réalisé en une quinzaine de jours, et la maison mise hors d'eau dans des délais très courts. C'est le temps de conception et de fabrication qui est le plus long et le plus délicat (vérifier les raccords, résoudre les problèmes d'étanchéité aux interfaces…), mais il est nécessaire et permet de réaliser un gain de temps à la mise en œuvre, et permet d'éviter les erreurs d'exécution, génératrices de sinistres."

Un bon projet repose sur une étude préalable rigoureuse.

"Il y a vingt ans, on a vu une vague de sinistres dans le domaine de la construction à ossature bois. Le concept de maison bois devait alors rimer avec maison moins chère, alors que chez nos voisins Allemands, une maison bois était avant tout une maison de grande qualité, et les moyens mis en face étaient conséquents et les services meilleurs. Cette réputation a fait beaucoup de tort à la construction bois, et aujourd'hui, si on revient vers le bois, (marché estimé à 7 % des constructions neuves contre 3 % il y a encore quelques années), c'est grâce à un effort de rigueur dans la conception des projets. L'apparition des pavillonneurs bois (Oxxo, Honka, Vivabois, Wood Home) contribue à améliorer la notoriété des constructions bois, mais il ne faut pas penser qu'ils sont les seuls à proposer de telles réalisations. Confier son projet à un architecte qui s'associe la compétence d'entreprises artisanales constitue une démarche simple, qui apporte des garanties en matière de qualité, tant au niveau de la conception que de la réalisation.

Cependant on ne s'improvise pas architecte bois du jour au lendemain, étant expert judiciaire auprès de la Cour d'appel de Bordeaux dans le domaine de la construction bois et des ouvrages en bois de toutes natures, je vois régulièrement des dossiers où des maisons récentes comportent des infiltrations et des mal-façons nombreuses, preuves qu'une construction bois c'est avant tout une bonne étude préalable. Au lieu de faire du tort à l'ensemble de la filière, il semble plus judicieux de fédérer les compétences et surtout d'accepter de se remettre en question.

Ma démarche consiste à proposer une offre d'ingénierie complète, de la conception à l'exécution, qui repose sur l'association des compétences spécifiques de l'architecte, chargé de la conception architecturale et technologique, et celles des artisans, dont le savoir faire est intégré en amont, au stade des études d'exécution. Il est en effet indispensable de concevoir l'ouvrage en prenant en compte les impératifs de la construction et de la mise en œuvre. C'est un travail d'équipe, qui conditionne la réussite de l'opération et la satisfaction du maître d'ouvrage."

Comment se former à la construction bois afin d'éviter ce genre d'écueils ?

Grâce aux efforts conjugués de quelques personnes, impliquées à différents titres dans le domaine de la recherche et de la formation universitaire, plusieurs programmes pédagogiques ont été développés ces dernières années en région Aquitaine, qui complète ainsi son pôle de compétences, et conforte son statut de leader dans la filière bois.

L'IUT de Génie Civil de Bordeaux, offre aux jeunes étudiants inscrits dans le cycle initial qui les conduit au D.U.T, la possibilité de bénéficier d'une formation spécifique « bois », qui leur permet d'appréhender les particularités de la construction en bois.

Ceux qui souhaitent se spécialiser peuvent ensuite suivre la formation dispensée dans le cadre de la licence professionnelle « Bois construction », dont l'objet est de permettre aux jeunes d'être rapidement opérationnels dans les PME du secteur, où ils répondent aux besoins croissants d'étude et d'encadrement auxquelles elles sont confrontées.

Né d'un partenariat entre l'Ecole d'Architecture de Bordeaux et l'Université de Bordeaux I, le DESS «Concevoir, construire avec le bois», offre quant à lui une formation de haut niveau à des jeunes provenant d'horizons différents, qui apprennent ici à mettre en commun leurs compétences pour conduire les projets avec un objectif de qualité. Pour la deuxième session, qui débutera en Septembre prochain, nous accueillerons des jeunes architectes, des ingénieurs issus du LRBB et de l'ESB de Nantes, des designers ainsi que d'autres profils qui vont se préciser au fur et à mesure des inscriptions.

Signalons enfin que le CNDB (Comité National pour la Développement du Bois), qui organise des stages de formation à l'attention des architectes, vient de signer une convention avec l'Ecole d'architecture de Bordeaux et l'Université de Bordeaux I, sous l'égide et avec le soutien de la région Aquitaine, pour promouvoir les actions visant à développer la sensibilisation du public et la formation des techniciens à la construction en bois. La signature de ce document est un acte positif et porteur d'espoir. Il faut maintenant passer à l'étape suivante, c'est-à-dire la mise en œuvre sur le terrain. Comme tout texte, cette convention sera ce que l'on en fera.

Former des techniciens compétents dans le domaine de la construction bois, et à tous les niveaux, relève de la priorité absolue si l'on ambitionne d'atteindre les objectifs inscrits dans l'accord-cadre «Bois-Construction-Environnement» signé au mois de mars dernier, qui fixe entre 10 et 15 %, la part du bois dans la construction d'ici 5 à ans.

Quels sont vos projets à venir ?

"Actuellement je réalise une maison au Cap-Ferret qui doit être livrée au mois de juillet prochain. Le concept et la volumétrie s'inscrivent dans une problématique contemporaine, tandis que la maison de Biscarrosse réinterprétait un modèle traditionnel.

Je travaille également sur le projet de rénovation de la piscine de Villenave d'Ornon, qui fait l'objet d'une procédure H.Q.E (Haute Qualité Environnementale). Compte tenu des contraintes spécifiques liées à la nature et à l'usage de cet équipement (fréquentation, présence de l'eau sous différentes formes, température ambiante…), l'utilisation du bois doit faire l'objet de précautions particulières. Paradoxalement, celui-ci dispose de certains atouts qui le distinguent des matériaux concurrents. Ainsi, pour réaliser la structure porteuse, nous avons conçu des poutres en bois lamellé-collé de 36 m de longueur, sous-tendues au moyen de tirants en acier. Nous utiliserons également le bois, pour réaliser l'ossature des pignons, ainsi qu'un revêtement de paroi et un plafond destinés à améliorer les performances acoustiques de la halle nautique. Le bois sera enfin utilisé pour augmenter le confort des spectateurs, auparavant assis sur des gradins en béton.

Je développe enfin un projet d'extension d'une surface commerciale, ou nous nous efforçons de démontrer que le choix du bois en structure s'impose, pourvu que l'on définisse les objectifs en termes de coût global (coût de construction, qualité d'ambiance et adéquation avec l'image des produits vendus, tenue au feu, durabilité…)."

Sans nul doute, nous suivrons tout ceci de près afin de vous proposer prochainement des photos étonnantes de constructions bois.

Contact : Jean-Jacques Soulas, Architecte D.E.S.A. - 23, av.du Mirail - Bât. E - 205 - 33370 Artigues - France - E-mail : soulas.archi@wanadoo.fr


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